16.2.10

Wittgenstein, les secrets d'alcôve, et moi




Je vous présente la phrase qui, de toutes les phrases de tous les livres de philosophie que j'ai jamais feuilletés d'un geste las, nu dans les bras de mes amants et de mes maîtresses torsadées, est de loin celle qui m'a le plus longuement habité.

Dans ma vie, hélas, les phrases ont la réalité des organes du corps. Et si la santé est le silence des organes (Blaise Pascal™), alors je suis un grand malade.

Elle est de Ludwig Wittgenstein. Elle parle de ce que la philosophie peut et ne peut pas exprimer. Elle parle de sa propre disparition en tant que phrase. Elle parle de ce que nous devons taire...

Elle parle pour moi, et résonne dans le vide de mes propres phrases :


« Wovon man nicht sprechen kann, darüber muß man schweigen.»



«Sur ce dont on ne saurait rien dire, il faut garder le silence.»

(7e proposition du Tractatus Logico-philosophicus)







PS - À partout, qui aime les jeux vidéo : le jouet Wittgenstein aux superpouvoirs amusants.



PPS - Extrait d'un texte des zinternets, donc douteux :

« Bertrand Russell, who knew Wittgenstein was gay, once hired him as a secretary. Amused by seeing him pace for hours up and down his room in agitated silence, like a wild beast, he asked him, "Are you thinking about logic or your sins?”

“Both,” he replied to Russell, then continued his pacing.»


So do I. So do I.

13.2.10

Exercice poétique









partout]


Gésir un long moment
Quelques ères
Molt lustres
Aux dernières lueurs
Diffuses


Gésir | avec toi | roi
Dans l'encorbellement
des mots


Fusent les dits
Des artères, de fureur
Inexorable
Tu es geyser
Tu es jaillissement
Et moi la
Terre




7.2.10

Du côté de chez Bast

"Amis, lorsque vous êtes réunis,
Il faut que vous pensiez tendrement à moi;
Quand vous boirez ensemble le vin généreux,
Et que ce sera mon tour, videz votre verre jusqu'au fond."

- Omar Khâyyâm, Quatrain LXXXIII



Long time no see, folks!

Ma vie est à un tournant, la tête me tourne, je suis ivre d'amour et en train de guérir d'une grosse grippe d'homme.

Que sont mes amis devenus? Je les ai hélas encore davantage délaissés que d'habitude... Entre le travail et l'amour, entre mes petits bobos et mes grandes folies, j'embrasse tout et personne en même temps. Ermite, je cultive le jardin candide de mes fantasmes avec Toi, mon Homme. Nous nous découvrons sur toutes surfaces de ce monde, sur toute l'étendue de nos conversations infinies. J'en perds la notion du temps. Je t'aime.




Mon Homme dit que je suis son Homme, et il rit quand je lui fais découvrir les dédales de mon univers mental ou municipal. Nous avons bouquiné, hier, et nous voyageons sans cesse dans nos mots et dans nos regards. Tu es beau quand tu me parles de tes pérégrinations aux quatre coins du monde.

(Mon Homme porte le titre glorieux d'Homme, il est l'Homme grec, au doux visage barbu aux yeux nacrés aux lèvres classiques, qui, perdu dans son exil de Bactriane, façonne lentement le corps sacré du Bouddha au galbe d'Apollon Musagète, indifférent aux exactions de Tamerlan et ému de la naissance d'une rose.)

Passionnés de l'Asie centrale, où tu es allé l'été dernier, je te parle de la religion perse achéménide, ou de la poésie iranienne, et tu me racontes les montagnes du Pamir, les rues de Samarcande, la beauté des yeux des Pashtounes. Entre deux projets de voyage ensemble, Moncton et les Balkans, Whapmagoostui/Kuujjuarapik et Ispahan, nous commençons lentement à apprendre le persan.

Je suis fou de toi. Ton corps m'est infiniment désirable, et je tremble de passion quand tu me parles, quand tu joues du saxophone, quand tu ris, quand tu jouis fort. Nos odeurs s'entremêlent, forment d'invisibles arabesques qui stimulent nos sens, et je découvre des délices dans tes bras aux noms de perversions raffinées. Comment ne pas être heureux avec toi, quand nous nous endormons, embrassés, devant un vieux film russe de Тарковский, ou bercés par la musique du grand Miles?







Je t'aime. Je t'aime d'amour anhistorique, je t'aime de tout mon corps mystique, je t'aime d'amour parce qu'en toi je suis ton Homme, et que tu es mon Homme à la masculinité triomphante, glorieuse, absolue, virilissime. En moi tu vis de vie palpitante, terrible, inquiétante, luxuriante, magnifique. Inonde-moi de toute la semence de ton amour. Que m'importe la chapelle des franciscains si tu jouis et si je jouis et si tout le reste ne devient que l'ustensile de notre amour?



"Puisque notre séjour en ce couvent n'est pas durable,
Sans l'Échanson et sans l'Amour, quelle amertume que la vie!
Ô philosophe, combien durent les croyances anciennes et nouvelles?
Puisque je dois partir, que m'importe si le monde est ancien ou nouveau?"

- Omar Khâyyâm, Quatrain CXII